
Patate douce, pois chiches et IA au célèbre Chelsea Flower Show de Londres

Patate douce au milieu des fleurs, pois chiches et arbres maternés par l’intelligence artificielle : le prestigieux Chelsea Flower Show de Londres est résolument tourné cette année vers l’avenir et l’adaptation au changement climatique.
Plus de 140.000 visiteurs sont attendus à partir de mardi pour ce salon horticole de cinq jours qui se veut "le summum de l’excellence horticole", avec des jardins extraordinaires et plus de 400 exposants, où d'élégants VIP en tenue fleurie sont encore parfois accueillis au champagne.
Le roi Charles III doit comme chaque année s'y rendre lundi en fin d'après-midi avec la reine Camilla, pour visiter notamment un jardin dessiné avec l'aide d'un chien, et un autre célébrant les forêts pluviales quasi disparues au Royaume-Uni.
Une trentaine de jardins sont en compétition cette année. Les températures élevées ces dernières semaines ont été un défi de plus pour les horticulteurs, pour que tout ne fleurisse pas trop tôt.
Dans la catégorie la plus prestigieuse des "Show Gardens", le "Jardin Intelligent" utilise de petits capteurs installés sur les arbres, et l'intelligence artificielle (IA), pour surveiller en temps réel la santé des arbres urbains.
Les visiteurs peuvent dialoguer avec les arbres grâce à l'IA, et leur poser des questions en utilisant une application sur leur téléphone.
Les arbres sont en ville des "alliés vitaux" de la lutte contre la pollution et le changement climatique, explique Tom Massey, l'un des paysagistes ayant créé ce jardin sponsorisé par Avanade et Microsoft.
Mais "30% meurent dans l'année où ils sont plantés et la moitié dans les dix ans", dit-il à l'AFP.
L'IA, entraînée pour devenir experte de chaque arbre, "ne va pas remplacer l'être humain (...)", précise l'architecte du jardin Je Ahn. Mais les données "nous donnent une idée plus claire de ce qui se passe".
- résilience et entraide -
Le "Jardin du futur" raconte lui un avenir où les excès du climat -chaleur, inondations et sécheresse- transforment les vies et où l'adaptation devient clé.
On y trouve des patates douces, des pois chiches, des fèves et du millet, au milieu des cistes pourpres, des aubépines et des bettes.
Ce jardin "aborde les questions auxquelles nous sommes confrontés avec le changement climatique", explique Matthew Butler, l'un de ses créateurs.
Certaines cultures ont prouvé leur résistance face au changement climatique et leurs vertus nutritives en Afrique. Elles "peuvent toutes pousser ici au Royaume-Uni", explique à l'AFP Ana Maria Loboguerrero, directrice des systèmes alimentaires adaptatifs et équitables de la Fondation Gates, qui depuis 20 ans travaille avec un réseau d'agriculteurs africains et de scientifiques sur une agriculture résistante au changement climatique.
C'est la première fois que la Fondation sponsorise un jardin à Chelsea.
"Ce qui est aussi intéressant dans ce jardin, c'est que les fleurs, les arbres, les cultures poussent ensemble, et s'entraident. Par exemple, certains offrent de l'ombre à des plantes qui n'aiment pas beaucoup le soleil", dit-elle.
Le petit bâtiment central est en pisé, et utilise l'énergie solaire. Toutes les eaux usées sont recyclées.
Cette année, de nombreux jardins sont inspirés de la nature à l'état sauvage, et le thème de la préservation est omniprésent : un jardin est consacré aux herbes sous-marines en Ecosse, un autre est planté de ronces, haies, et graminés pour aider les oiseaux chanteurs, dont la population a diminué de 50% en deux générations au Royaume-Uni.
L'exposition, organisée par la RHS (Royal Horticultural Society) dans le parc de l'hôpital royal de Chelsea, est depuis des années soucieuse de développement durable et de biodiversité.
Très respectée au Royaume-Uni, la RHS s'était fixé en 2021 d'interdire la tourbe pour toutes ses opérations d'ici la fin 2025. Cette matière végétale très utilisée en horticulture, vient de l'exploitation des tourbières, puits de carbone naturels dont la formation prend des milliers d'années.
Mais fin mars, la RHS a annoncé qu'elle repoussait jusqu'en 2028 cet objectif pour les pépinières vendant dans les expositions horticoles.
Elle a expliqué sa décision par l'absence de législation interdisant la tourbe au Royaume-Uni, en dépit de ses efforts, et par son souci de protéger les pépinières britanniques durant leur transition.
G.Boudreau--SMC