Israël: le chef d'état-major demande une "enquête systémique" sur le 7-Octobre
Le chef d'état-major israélien a appelé lundi à une "enquête systémique" sur le 7-Octobre à l'heure où le gouvernement refuse l'établissement d'une commission nationale d'enquête permettant d'établir les responsabilités dans l'échec des autorités à prévenir l'attaque la plus meurtrière qu'ait connue Israël.
Le lieutenant-général Eyal Zamir a formulé cette demande après la publication du rapport d'un comité d'experts mandaté par ses soins marquant la fin des enquêtes au sein de l'armée sur les défaillances ayant mené au drame du 7 octobre 2023 et concluant à une "défaillance systémique et organisationnelle de longue date".
Ce rapport "marque une étape importante vers la compréhension globale dont nous avons besoin, en tant que société et en tant qu'organisation", a déclaré le général Zamir, selon un communiqué de l'armée, "cependant, pour garantir que de tels échecs ne se reproduisent jamais (...) une enquête systémique large et complète est désormais nécessaire".
En dépit de sondages montrant qu'une large majorité d'Israéliens, quelles que soient leurs tendances politiques, soutiennent l'établissement d'une commission nationale d'enquête sur le 7-Octobre, le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu s'y oppose.
Selon la loi israélienne, la décision de créer une commission nationale d'enquête revient au gouvernement et il revient à la Cour suprême d'en nommer les membres.
Or le gouvernement Netanyahu formé en décembre 2022, l'un des plus à droite de l'histoire d'Israël, accuse cette institution d'être politiquement biaisée et acquise à la gauche.
L'affaiblissement des pouvoirs de la Cour suprême --présenté par l'exécutif comme un nécessaire rééquilibrage des pouvoirs-- était au coeur du projet de réforme de la justice porté par le gouvernement qui a profondément divisé la société israélienne avant que n'éclate la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas.
Sommé par l'opposition de s'exprimer sur la question, M. Netanyahu a redit lundi devant les députés qu'il était opposé à la mise en place d'une commission nationale d'enquête, qui serait selon lui un "outil politique" aux mains de ses adversaires.
Il a suggéré plutôt la création d'une commission d'enquête "avec un large accord national" sur le modèle américain après le 11-Septembre. Proposition immédiatement rejetée par l'opposition.
- "Echec conceptuel" -
L'attaque du 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.
Plus de 69.179 Palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza par la campagne militaire israélienne de représailles, essentiellement des civils, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas et dont les chiffres sont jugés fiables par l'ONU.
En février, une enquête interne de l'armée avait déjà reconnu son "échec complet" à empêcher l'attaque de commandos du Hamas à partir de Gaza, et un "excès de confiance" l'ayant conduite à sous-estimer les capacités du mouvement islamiste.
Le rapport d'experts publié lundi identifie en premier lieu un "échec conceptuel" correspondant au "fossé entre la réalité stratégique et opérationnelle et la perception (au sein de l'appareil militaire) de la réalité concernant la bande de Gaza et le Hamas".
Il relève aussi un "échec du renseignement" militaire dans son "incapacité à donner l'alerte" alors même que l'armée disposait d'informations "exceptionnelles et de haute qualité".
Déplorant des "processus de prise de décision et de déploiement des forces déficients dans la nuit du 7 octobre 2023", le comité pointe des échecs au niveau de l'état-major général, de la direction des opérations, de la direction du renseignement militaire, du Commandement Sud, mais aussi de l'armée de l'Air et de la Marine.
Y.X. Gagnon--SMC